Chômage de droite

Publié le par cassetoi-vlp

 

Le chômage! Avec la dette le deuxième gros monstre qui peuple nos cauchemars collectifs, lorsque nous prenons le temps de penser à la situation. En pleine trêve des confiseurs, me direz-vous, nos problèmes de sommeil viennent plus généralement du foie que du chômage. Quoique, les personnes que touche le second aient la plupart du temps beaucoup moins de soucis avec les excès de table.

Le chômage, donc, est une vieille menace installée chez nous depuis... On finit par ne plus savoir (*). Un peu comme le loup dans l'ancien temps. Une crainte qui empêche de vivre même lorsqu'elle ne se réalise pas. Il ne tue pas en masse, mais il empêche de vivre. Il décourage de faire des projets, de fonder une famille, de se loger correctement. Il contraint à subir dans le travail l'inacceptable sans broncher. Si vous connaissez des anciens, qui travaillaient au début des années 1970, demandez-leur. Auraient-ils accepté de signer pour des horaires surréalistes, temps partiel avec 4 heures de coupure, horaires et salaires imprévisibles ? Auraient-ils laissé leurs enfants diplômés se déqualifier pour une bouchée de SMIC ? Un petit (ou grand) chef se serait-il permis de pousser les gens au bord de la dépression sans que personne ne dise rien ? Aurait-on laissé passer des années avant que les salaires ne suivent la hausse des prix ? Bien sur que non.

 

À ceux qui ne l'ont pas connu, je dois sembler raconter un âge d'or mythique. Ce n'est pas le cas, la vie était plus courte, les morts au travail ou sur la route supportés comme une fatalité, l'alcoolisme des classes laborieuses ou les droits de l'enfant à ne pas recevoir de gifles n'étaient pas de grandes causes nationales. On n'avait ni ordinateurs ni Téléthon. Mais quand quelqu'un rentrait dans une entreprise, c'était pour faire ce qu'il savait faire (au moins), avec un contrat stable, un salaire correct et des perspectives sérieuses de le voir évoluer. Il (elle) comptait bien que les études de ses enfants leur permettraient d'avoir une vie plus intéressante et confortable, ne se demandait pas comment il (elle) vivrait une fois trop âgé pour travailler. Bref, tout ceci pour dire que la vie sans chômage de masse, ça existe et ce n'est pas mal.


Alors, encore une fois, la même question que pour la dette: d'où ça sort, cette invention ? Sans détailler les origines, c'est depuis le début une histoire de commerce international. En France, en tous cas, le libre-échange y est pour beaucoup. Libre-échange ? On n'entend plus beaucoup l'expression, tellement c'est devenu une évidence. On n'en parle même plus: on ne le discute même plus. Aujourd'hui, on dit l'OMC, le traité de Lisbonne, et la liberté des échanges est un droit lpus fondamental que la liberté d'expression.

En réalité, la liberté des échanges est un système qui favorise surtout les fournisseurs d'emploi et de biens. Grâce au libre-échange, on peut produire en Chine, ou même en Roumanie, et mettre ces produits en concurrence avec la production locale française: Le libre-échange donne à manger à la xénophobie. Il crée les conditions du déséquilibre entre employeur et salarié, aussi bien là-bas qu'ici. Ne nous y trompons pas: Si les perspectives n'étaient pas aussi mirifiques pour les patrons chinois, la pression serait moins intense sur le dos de leurs salariés. S'ils avaient besoin de clients chez eux, ils commenceraient par payer correctement leurs propres salariés. Les patrons ont compris cela depuis Henry Ford, qui payait bien pour que ses ouvriers s'achètent des Ford. Par ici la monnaie! Si les produits fabriqués par des enfants ou dans des usines polluantes étaient dûment taxés à l'importation, ils perdraient leur intérêt. Coût du transport aidant, la production reviendrait là où sont les consommateurs.

 

Un rêve... Se faire du bien en aidant les autres à s'en sortir. Arranger à la fois le porte-monnaie et la bonne conscience! Et pourtant, ce n'est pas une utopie, ce sont des décisions politiques parfaitement réalisables par un Parlement déterminé. Nous n'avons pas grand-chose à y perdre. Même si la Chine, pour rester sur cet exemple, sanctionne en retour les produits français, nos échanges avec elle ne sont pas énormes en valeur. Le retour vers le plein emploi, par contre représente pour le pays un gain considérable: moins d'aides sociales, plus d'impôts, plus de consommation, et par-dessus tout la motivation revenue. Imagine-t-on des jeunes à qui l'on pourrait dire: "si tu travailles bien tu auras un bon emploi" et que cela soit vrai ? De moins jeunes, fatigués de leur métier, qui pourraient se lancer dans une autre carrière avec quelque chance de succès ? Un système de retraites équilibré par un nombre suffisant de cotisants ? Etc...

 

Ce que nous imaginons là est une situation où chacun serait plus riche de liberté, de sécurité, de perspectives, mais à coup sûr moins soumis, et plus porté à critiquer la souffrance évitable. Moins susceptible d'être astreint à n'importe quoi pourvu qu'on lui fasse la grâce de lui éviter Pôle Emploi.

 

Le chômage, c'est un truc de droite, finalement. Entretenu par des lois de droite, dans l'intérêt de gens de droite. Et pas du tout inévitable. À bon entendeur ...

 

(*) 1973 et le premier choc pétrolier.

Publié dans Idéologies

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D
Totalement d'accord, le chômage est délibéré.
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